Ben Kamuntu, vous venez de remporter le prix SoliDareHub 2024. Félicitations ! Pouvez-vous vous présenter en quelques mots pour nos lecteurs ?
Je m'appelle Ben Kamuntu, je suis artiste, slameur, poète et j'ai eu l’honneur de remporter le prix SoliDareHub qui a consisté à accompagner des projets de coopération et de développement porté par des jeunes. Je suis un citoyen engagé, un artiste qui utilise les mots pour soigner les maux. Je suis une personne qui crée des ponts à travers la poésie et je crois en la capacité de la poésie à construire un imaginaire collectif qui place les individus en son sein, et ce, au-delà des frontières.
Pouvez-vous nous parler de votre projet et ce en quoi il a consisté?
Mon travail a consisté à soutenir des actions, et des collectifs qui existent déjà et qui travaillent sur place et qui tentent de faire changer les choses à leur niveau à savoir soutenir l’initiative Goma Slam Session en RDC, qui utilise la poésie pour renforcer la cohésion sociale.
Aujourd'hui, dans beaucoup de pays d'Afrique, notamment la République démocratique du Congo (RDC), le Burundi, le Benin, il n’y a presque pas de politique de d'éducation culturelle. Malgré tout, il y a des jeunes qui prennent des initiatives, qui s'organisent et qui utilisent la poésie comme une forme d'éducation culturelle. Ils donnent par exemple des ateliers d'écriture et des performances de slam dans les écoles. Et pour moi, le projet consistait à accompagner ces structures en RDC en écoutant leurs besoins et en les aidant à tisser un réseau et des collectifs pour échanger. Ce réseau leur permet d’échanger les bonnes pratiques pédagogiques, les expériences artistiques, mais aussi et surtout de constituer un bloc de plaidoyer des jeunes poètes slamers portant des messages de paix et d’humanité.
Vous évoquez l'importance de l'implication des jeunes et de la création de réseaux. Selon vous, quelles sont les étapes clés pour créer un projet de coopération responsable, à l'instar du vôtre, qui a remporté le prix SoliDareHub ?
La première des choses c’est se rendre compte qu'il existe déjà des initiatives. Il y a des associations, des collectifs qui ont des idées, qui travaillent sur le terrain. Quand on met en place un projet de coopération ou de développement, il faut partir de et voir ce qui est fait sur place. C’est en prenant cette base qu’on peut les accompagner et avoir plus d’impact. Dans le passé, je n’avais pas cette approche. Je me disais que j'avais mes idées, que j’ai mes expériences et mon expertise en tant que slameur de longue date, et que je pouvais tout simplement proposer des ateliers d’écriture et pourquoi pas l’enregistrement d’un album aussi.
Je me suis rendu compte avec la trajectoire de ce projet dans le cadre du programme porté par Enabel et BeGlobal, qu’il faut avant tout prendre en compte les expériences réelles du terrain et des besoins locaux. Par exemple, il y a déjà beaucoup de collectifs au Congo, au Burundi, au Rwanda, au Bénin, au Maroc, qui s'organisent, qui font des actions, des soirées slam, des ateliers d'écriture et des performance dans les écoles. De ma fenêtre, je ne peux pas juste y aller et me dire que je vais animer des ateliers puisqu’ils le font déjà depuis bien longtemps. Ils ont avant tout besoin de se connecter, ils ont besoin que l’on rende visibles leurs projets, de créer des ponts avec des personnes qui partagent les mêmes situations et les mêmes besoins mais qui avant tout partagent les mêmes valeurs de paix, de dignité, et de justice sociale.
Je suis convaincu qu’à travers la poésie on peut encore rêver un autre monde de paix et surtout pour les jeunes, on peut encore trouver un moyen d’exister.